La reliure wire-edge de Daniel E. Kelm : version avec cahiers

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Je vous présente aujourd’hui ma reliure Tes doigts, utilisant la technique de la reliure wire-edge.

Le tutoriel de Kelm & Elbel

Dans le dernier numéro de Arts et Métiers du Livre, Benjamin Elbel présente son nouveau tutoriel : la reliure Pixel. qui a l’air très intéressante et que je pense tester bientôt…


Je saisis l’occasion de cet article pour vous présenter une autre technique de reliure présentée par Benjamin et mise au point par Daniel E.Kelm : la reliure wire-edge. Benjamin m’avait proposé de m’envoyer ce tuto afin que je le teste en 2023. C’est ce que j’ai fait sur ce joli petit livre : Tes Doigts, un texte de Hervé de Fontenay et des gravures de Marc Garneau, imprimé et édité par Agathe Piroir, de l’atelier A.Piroir.

Agathe m’avait confié ce texte pour créer la reliure de mon choix, afin de l’exposer lors de différents salons.

J’ai donc mis en pratique la technique de Daniel E. Kelm, en l’adaptant à ma façon. Elle offre une ouverture à plat très adaptée au livre orné de superbes gravures, et son look ne laisse pas indifférent.

Si vous ne connaissez pas la relire wire-edge, elle mérite votre attention. C’est une technique d’articulation de plats rigides (pages ou façades de boite), montés sur des tiges de laiton et liés entre eux par des fils savamment noués.
Benjamin a présenté la technique à plusieurs reprises, notamment dans la publication numéro 355 de mars-avril 2023 de Arts et métiers du Livre. Vous pouvez aller lire l’article en détails si vous le souhaitez, l’AQRAL les archive et les revues sont consultables si vous êtes membre.

Aurore Monnet, qui est actuellement en stage à l’atelier, s’y est frottée. Elle a réalisé une belle reliure, idéale pour présenter un document de quelques pages ou quelques gravures. La sienne est encore vierge mais on imagine facilement sur chaque page, un texte ou une illustrée collée.

Crédit photo : Aurore Monnet

La wire-edge à cahiers

Le challenge était structurel : la technique est conçue pour assembler des plats rigides, et mon livre était bien sûr composé de classiques cahiers. J’ai donc cherché comment fixer chacun de mes cahiers aux tiges de laiton qui servent de support à l’entrelaçage des fils de reliure.

Daniel Kelm monte ses tiges (qui sont de la même épaisseur que le carton qui constitue chaque page de son livre) en les « enrobant » d’un papier. Après quelques essais – erreurs, j’ai procédé un peu de la même façon. Au lieu d’un carton, j’ai préparé un onglet inversé, en carte de couleur noire, dans lequel j’ai pu coudre mon cahier, avec une couture simple à trois points
La difficulté était évidemment de faire correspondre l’épaisseur du cahier, l’épaisseur de l’onglet noir et l’épaisseur de la tige de laiton. J’ai donc dû doubler l’épaisseur de l’onglet noir pour que cela corresponde exactement.

Je vous fais un petit schéma très grossier, mais qui explique le montage que j’ai élaboré, en vue du dessus. Dans le tutoriel, bien entendu, il y a pas mal d’étapes préliminaires, notamment pour placer les trous de couture dans le papier que j’appelle « d’enrobage ». Et le tissage en lui-même, bien sûr. Mais si vous achetez le tuto et vous vous lancez, voici une piste pour relier des cahiers…

J’ai aussi préparé le plat avant et le plat arrière, de façon plus classique, selon la technique de Kelm.

Une fois ce montage fait, j’ai ensuite simplement suivi le tutoriel pour assembler les pages en nouant un fil de nylon jaune fluorescent (gracieuseté de Nina Janvier)

Tes doigts – la démarche

Le décor est inspiré des empreintes digitales. L’idée était de reprendre les motifs des gravures de Marc Garneau et les transformer en aplats de couleur sur le cuir, en utilisant la technique de l’incrustation à niveau. Le choix du rose pâle était évidemment une référence à la pulpe rosée des doigts.

Gravure de Marc Garneau, applats arrondis noirs sur papier blanc

La doublure des plats est en veau rose framboise. Une suite numérotée accompagne le livre. Elle se loge dans une chemise de cuir. Un coffret à châsses en buffle noir, choisi pour sa texture forte, complète l’ensemble.

J’ai voulu un fil de couleur très saturée, fluorescent, afin de créer un contraste marqué, qui attire le regard sur la couture si singulière de la reliure.
J’ai enfin doré les chants au film et à la colle, pour leur donner une texture un peu irrégulière et chaleureuse.

La reliure a été exposée à plusieurs reprises :

  • Salon du livre rare & des arts graphiques, à Paris, en 2025, 2024 et 2023
  • Standards of Excellence, the Guild of Book Workers en 2024 à San Francisco et en 2023 à Providence, Rhode Island
  • Codex 2024, Henry J. Kaiser Convention Center à Oakland, en Californie

Voilà, j’espère que cela vous donne envie d’expérimenter la reliure wire-edge. Elle est plus impressionnante qu’elle n’est difficile. Comme d’habitude, Benjamin Elbel offre des tutoriels de super qualité : explications en deux langues (ou trois), largement illustrées de nombreuses photos, kit tutoriel qui permet de se lancer sans avoir à chercher les matériaux à droite et à gauche…

J’ai enseigné assez longtemps l’Elbum et le Tue-mouche (qui reste ma technique favorite ever <3), vous pouvez y aller les yeux fermés 😉